Afin d’éviter un choc des civilisations, l’islam doit se réformer. C’est la thèse de nombreuses personnes dans les pays occidentaux. En pointant à la réforme protestante du christianisme comme une preuve que l’islam peut aussi se réformer, plusieurs d’entres-eux sont optimistes.
Cependant, ce que la plupart de ces individus ne comprenent pas, c’est que l’islam a déjà été réformé. Ce qu’on appelle aujourd’hui le «radicalism islamique» est la réforme de l’islam. Et cette réforme suit les mêmes démarches que la réforme protestante du christianisme.
Le problème est notre compréhension du mot «réforme». Malgré ses connotations positives, le mot «réforme» signifie simplement «faire des changements (généralement dans une institution sociale, politique ou économique) afin de l’améliorer».
Les synonymes de “réforme” comprennent «faire mieux», «améliorer» et «parfaire» – des mots splendides quand ils sont sujets à des références occidentales.
Cependant, pour les Musulmans, l’idée «d’améliorer» une société peut inclure une purge des «infidèles» et de leurs corruptions morales; ou de séparer les hommes des femmes, en gardant ces dernières sous contrôle ou en quarantaine (à la maison); ou l’exécution des apostats, qui sont considérés des traîtres.
L’interdiction de nombreuses formes de libertés prises pour acquis en Occident – la consommation d’alcool, la liberté religieuse, et l’égalité des sexes – peuvent être considérées comme une «amélioration» et un «perfectionnement» de la société.
En bref, une réforme islamique ne mènera pas à ce que nous considérons comme une «amélioration» et «perfectionnement» de la société parce que «nous» ne sommes pas des musulmans et nous ne partageons pas leur histoire et leurs points de référence. Le terme «réforme» résonne bien pour la majorité des occidentaux, qu’ils soient séculaires ou religieux, parce qu’ils sont dans une large mesure les produits de la réforme protestante du christianisme; et donc, ils attribuent naturellement des connotations positives à ce mot.
_______________________
À la base, la réforme protestante a été une révolte contre les traditions au nom des écritures saintes – la Bible. Avec l’avènement de l’imprimerie, un nombre croissant de chrétiens sont devenus plus informer sur le contenu de la Bible, et voyaient une contradiction avec certaines sections de la Bible et ce que l’église enseignait. ils se sont alors séparés, protestant que la seule autorité chrétienne était «la seule écriture», sola scriptura.
La réforme islamique suit la même logique de la réforme protestante – en donnant une priorité particulière aux écritures écritent au cours des siècles discutant des traditions et des débats juridiques passés – mais avec des résultats opposés qui reflètent les enseignements contradictoires des textes fondamentaux du christianisme et de l’islam.
Comme le christianisme, dans la plus grande partie de son histoire, les textes sacrés de l’islam, en particulier ses «deux piliers», le coran (la parole d’Allah) et le hadith (paroles et actes du prophète d’Allah, Muhammad), étaient inaccessibles à la grande majorité des musulmans. Seuls quelques académiens ou ulémas – signifiant littéralement «ceux qui savent», savaient lire et écrire en arabe et/ou avaient en leur possession les textes sacrés de l’islam. Le musulman moyen ne connaissait que les bases de l’Islam, ou ses «cinq piliers».
Dans ce contexte, une «synthèse médiévale” a dévelopé à travers le monde islamique. Guidé par l’évolution d’un consensus général (ou ijma‘), les musulmans ont cherché à accommoder la réalité par, selon les mots de l’historien médiéval Daniel Pipes,
la traduction de l’islam d’un système abstrait avec des exigences impraticable (tel que stipuler dans le coran et le hadith) en un système opérationel. En termes pratiques, elle [la synthèse médiévale] a atténué la charia et a rendu le code juridique plus pratique. La charia pouvait maintenant être appliquée sans soumettre les musulmans à ses exigences plus strictes … Alors que la synthèse médiévale a bien fonctionné au cours des siècles, elle n’a jamais surmonté sa faiblesse fondamentale: elle n’est pas complètement enracinée ou dérivée des textes constitutionnels fondamentaux de l’islam. Basée sur des compromis et des demi-mesures, elle est toujours restée vulnérable à être contester par les puristes (emphase ajoutée).
Cette vulnérabilité a maintenant atteint un point critique: des millions de corans publiés en arabe et d’autres langues sont maintenant disponibles par rapport aux siècles derniers; plusiours millions de musulmans sont maintenant lettrés et peuvent lire et comprendre le coran par rapport à leurs ancêtres médiévaux. Le hadith, qui contient certains des enseignements les plus intolérants ainsi que les actes de violence attribués au prophète de l’islam, est maintenant accessibles, en partie grâce aux efforts des académiens occidentaux – les orientalistes. Plus récemment, il y a l’internet – où toutes les écritures sont maintenant disponibles dans des dizaines de langues à n’importe qui avec un ordinateur portable ou un iPhone.
Dans ce contexte, ce qui est appelé à des moments, endroits, et contextes différents « le fondamentalisme islamique», «le radicalism islamique», «l’islamisme» ou « le salafisme» ont prospéré. Aujourd’hui, de nombreux musulmans, plus instruit que leurs ancêtres sur les notions de «blanc et noir» de leurs textes sacrés, protestent contre les traditions antérieures dérivées de la «synthèse médiévale», en faveur des textes sacrées – tout comme leurs homologues chrétiens protestants ont fait auparavant.
Ainsi, si Martin Luther (décédé en 1546) a rejeté les accrétions extra-scripturaires de l’église et a «réformé» le christianisme en l’alignant plus étroitement avec les écritures saintes, Muhammad ibn Abdul Wahhab (décédé en 1787), l’un des premiers réformateurs modernes de l’islam a, selon Bernard Lewis (The Middle East, p. 333), «appelé à un retour à la pureté, l’islam authentique du prophète, et le rejet des accrétions qui ont corrompu et déformé».
Les mots non frelatés de Dieu – ou d’Allah – sont tout ce qui importe pour les réformistes.
Remarque: Parce qu’ils sont plus instruits sur les textes sacrés de l’islam, d’autres musulmans deviennent des apostats en se convertisant à d’autres religions, notamment le christianisme, ou ils abandonnent toute religion, même si ce n’est que dans leurs cœurs (par crainte d’être pénalisés pour apostasie). C’est un point important à être discuté plus tard. Cet article mentionne seulement les musulmans qui, après s’être familiarisés avec les textes sacrés islamique deviennent des musulmans fondamentalistes.
__________
Comment le christianisme et l’islam peuvent suivre des modèles semblables de réforme, mais avec des résultats opposés, repose dans le fait que les textes sacrés de l’un sont souvent l’antithèse des textes sacrés de l’autre. Et c’est le point centrale, un point non comprenable pour les post-modernistes avec leurs sensibilités laïques, qui ont tendance à regrouper toutes les écritures religieuses dans un même melting-pot de relativisme sans se soucier d’évaluer l’importance de leurs paroles et leurs enseignements respectifs.
Évidemment une comparaison point par point des textes sacrés de l’islam et du christianisme est inapproprié pour un article de cette longueur (voir «Est-ce que le judaïsme et le christianisme sont aussi violent que l’islam» pour un aperçu plus complet).
Il suffit de constater certaines contradictions (qui seront rejetées par les relativistes):
– Le nouveau testament prêche la paix, l’amour fraternel, la tolérance et le pardon – pour tous les êtres humains, croyants et non-croyants. Au lieu de combattre et de convertir les «infidèles», les chrétiens sont appelés à prier pour ceux qui les persécutent et à tendre l’autre joue (ce qui n’est pas la même chose que la passivité, parce que les chrétiens sont aussi appelés à faire preuve d’audace et à se défendre). Inversement, le coran et le hadith appel à la guerre, ou le djihad, contre tous les non-croyants, jusqu’à ce qu’ils se soient convertis, soumis, ou morts.
– Le nouveau testament n’a pas de punition pour l’apostat du christianisme. Inversement, le prophète de l’islam a lui-même décrété que «quiconque quitte la religion islamique, tuez-le».
– Le nouveau testament enseigne la monogamie, un homme et une femme, dignifiant ainsi la femme. Le coran autorise la polygamie – jusqu’à quatre épouses – et la possession de concubines ou d’esclaves sexuels. Ceux qui suivent littéralement les textes islamiques traitent les femmes comme des possessions.
– Le nouveau testament décourage le mensonge (Colossiens 3:9). Le coran l’autorise; le prophète a lui-même souvent trompé d’autres pour reconcilier différents goupes qui se querellaient. Il a aussi permis aux hommes de mentir à leurs femmes, ainsi qu’aux «infidèles» pendant la guerre.
C’est précisément parce que la version littéraire de la bible chrétienne se prête à la liberté religieuse, la tolérance, et la dignité des femmes, que la civilisation occidentale a développé de la façon dont elle l’a fait en dépit de la campagne de propagande sans escale émanant des milieux universitaires, d’Hollywood, et des médias de masse qui disent le contraire.
Et c’est précisément parce que la version littéraire des textes sacrés islamiques est en contradiction avec la liberté religieuse, la tolérance, et la dignité des femmes, que la civilisation islamique est de la façon qu’elle est, malgré la campagne de propagande sans escale émanant des milieux universitaires, d’Hollywood, et des médias de masses qui disent le contraire.
_______________
Ceux en occident qui attendent qu’une «réforme» islamique semblable à la réforme protestante, croyant que cela conduira à des résultats similaires, doivent accepter deux faits: 1) la réforme de l’islam est en train de se faire, et oui, elle est en train de ce faire le long des mêmes lignes que la réforme protestante – en mettant l’accent sur les textes sacrés et un mépris pour les traditions – et pour des raisons historiques similaires (d’alphabétisation, distribution de bibles, etc); 2) et parce que les enseignements fondamentaux des textes sacrés du christianisme et de l’islam sont très différents les uns des autres, la réforme de l’islam a naturellement produit une civilisation très différente de l’occident.
En d’autres termes, ceux en occident appelant à une «réforme islamique» doivent reconnaître ce qu’ils veulent vraiment: la sécularisation de l’islam au nom de la modernité; la banalisation et la mise à l’écart de la loi islamique de la société musulmane.
Mais ce ne serait pas une «réforme» – certainement rien de semblable à la réforme protestante.
Ce qui est souvent ignoré est que le securalism occidentale a été, et est, possible seulement parce que les textes sacrés chrétiennes se prêtent à la séparation entre l’église et l’état, le spirituel et le temporel.
Défendre les enseignements littérale du christianisme est possible dans un état laïque. Le Christ a appelé les croyants à «Rendez à César ce qui appartient à César (temporel), et à Dieu ce qui appartient à Dieu (sprirituel)» (Matthieu 22:21). Pour le «royaume de dieu» n’est «pas de ce monde» (Jean 18:36). En effet, une bonne partie du nouveau testament traite de la façon dont «l’homme n’est pas justifié par les oeuvres de la loi … parce que sur les principes des œuvres de la loi nulle chair ne sera justifiée» (Galates 2:16).
Inversement, l’islam doit faire respecter la loi; et les écriture sainte islamique appelle à une fusion de la loi islamique – la charia – et l’état. Allah décrète dans le coran: «Il ne convient pas pour les vrais croyants – hommes ou femmes – de décider par euz-même si Allah et son messager ont décidé autrement. Celui qui désobéit à Allah et à son messager se distance de la foi» (33:36). Allah a dit au prophète de l’islam, «Nous vous mettons sur un chemin ordonné de commandement; alors, suivez-le et ne suivez pas les inclinations des ignorants» (45:18).
L’exégèse islamique dominant a toujours interprété ces versets pour dire que les musulmans doivent suivre les commandements d’Allah décrit dans le coran et le hadith (la charia).
Aussi, la charia est tellement préoccupée par les détails de ce monde, les actions quotidiennes des musulmans, que toute action humaine concevable tombe sous les cinq ordonances suivantes, ou ahkam: ce qui est interdit (haram), ce qui est découragé (makruh), ce qui est neutre (mubah), ce qui est recommandé (mustahib), et ce qui est obligatoire (wajib).
Inversement, l’Islam offre peu concernant le spirituel (le soufisme islamique est l’exception).
Contrairement au christianisme, l’islam sans loi – sans la charia – devient vide de sens. Après tout, islam en arabe signifie littéralement «se soumettre». Se soumettre à quoi? Les lois d’Allah codifiées dans la charia qui dérivent du coran et du hadith.
La “réforme islamique” que certains dans le modne occidentale souhaitent est simplement un islam sans islam – séculaire versus réformer; des musulmans prioritisant des lois laïques, civiques, et humanitaires sur la loi d’Allah; une «réforme» qui verrait la religion de Muhammad disparaître lentement dans l’histoire.
Un tel scénario est certainement plus plausible que de croire que l’islam peut être fidèle à ses textes sacrés de manière significative et encore coexister paisiblement avec le monde moderne de la même façon que le christianisme l’a fait.
Leave a Reply